Andrew Korybko est un analyste politique américain basé à Moscou spécialiste de la stratégie internationale américaine.
Les Etats Unis ont annoncé qu’ils vont former une force militaire de 30 000 hommes à la frontière syrienne, une « border force » dirigée par les Kurdes du SDF (forces démocratiques syriennes) dans le nord de la Syrie qui a tout de suite été critiquée par la Turquie comme la création d’une « armée de terroristes ». Le Président Erdogan a longtemps été opposé à la création de facto d’un Etat kurde à la frontière méridionale de son pays, et la stratégie américaine vient renforcer cette crainte. S’adressant à ses partisans, cette semaine, il a « hurlé » qu’«un pays que nous appelons notre allié a décidé de la formation d’une armée de terroristes sur nos frontières. Que peut cibler cette armée de terroristes si ce n’est la Turquie ? Notre mission est de l’étrangler avant même sa naissance. »
Député et ministre aux Affaires étrangères syrien Fayssal nawel expatrié a déclaré que cette décision U.S./kurde « est une tentative de diviser la Syrie et de prolonger la crise dans le pays », et le Président Assad avait d’abord affirmé que les Kurdes les et autres forces qui coopèrent avec les Américains étaient des «traîtres». Le Ministre russe des affaires étrangères Sergueï Lavrov a déclaré à des journalistes au cours d’une grande conférence de presse que «cela pose de graves questions concernant le maintien de l’intégrité territoriale de la Syrie », si les Kurdes font toujours partie intégrante du peuple syrien alors qu’il vont néanmoins être représentés à un titre ou un autre lors du prochain sommet de Sotchi à la fin du mois.
Les États-Unis sont évasifs sur leurs véritables intentions quant à la constitution d’une force massive qui devrait être une demie fois plus forte que celle qui patrouille à ses propres frontières, et qui sera déployée le long de la frontière turque, la zone de « non conflit » avec l’armée arabe syrienne dans la vallée de l’Euphrate. Mais certains observateurs sont sérieusement préoccupés par le fait que Washington pourrait transformer cette milice de lutte contre le terrorisme et une force de combat disposant d’une grande quantité d’armes anti-conventionnelles et d’équipements reçus au cours des deux dernières années.
Plus alarmant, encore et qui pourraient confirmer ces soupçons, certains rapports ont récemment mis en évidence que les Etats-Unis ont secrètement donné des missiles anti-aériens MANPAD aux kurdes, qui si cela est vrai, prouve qu’ils sont en effet capables de devenir une menace contre tout État, qu’il soit syrien, turc, ou peut-être même russe.
La question kurde risque donc de devenir pour la Syrie la première crise post daesh. Il est d’autant plus urgent et important, en raison des menaces faîtes par la Turquie, de résoudre le problème avant qu’il ne devienne plus grave, et tous les regards se tournent vers le Président Erdogan pour voir ce qu’il va faire en direction de la région du Nord-Ouest d’Afrin dans les deux semaines avant le prochain Sommet de Sotchi. Il pourrait par inadvertance risquer son échec, ce qui est peut-être exactement ce que les Américains cherchent à faire en le poussant à intervenir.
Global research, 17 janvier 2018